Flash Info 202 : NTF saisit la Justice contre une décision communale qui met en péril les droits de la propriété privée et plus encore...

Dernière mise à jour le 26 Feb. 2023

La commune de Stoumont a décidé en septembre dernier d’interdire le nourrissage du grand gibier sur tout son territoire (forêt publique et privée) sur la base de l’article 58 quinquies de la Loi sur la Conservation de la Nature [1]. Cette décision a été confirmée par la Ministre compétente en la matière, Madame Céline Tellier, le 23 décembre dernier.


Que prévoit la loi ?

La Loi sur la Conservation de la Nature (LCN) punit toute action qui a pour effet de détruire ou de perturber les animaux et végétaux repris dans des listes officielles d’espèces en danger. Elle punit également certains actes précis comme par exemple, la replantation de résineux à moins de 6 m des cours d’eau. Au demeurant, elle permet aux communes d’ériger des règlements locaux « plus stricts » que ce que contient la loi, sous réserve de les faire valider par le Ministre de Tutelle, sur base notamment de l’avis de la Section Nature du Pôle Ruralité.

 

La commune et la Ministre argumentent leur décision

En vertu de cette loi, les autorités ont fourni une argumentation très étayée de leur décision sur base du constat manifeste d’une densité totalement anormale de gibier et des préjudices tant sur les milieux agricoles que forestiers. La commune précise avoir agi « en désespoir de cause » parce que les dispositifs existants de la Loi sur la chasse n’ont pas pu lui apporter de solutions tangibles pour réguler cette surdensité. La Ministre affirme dans son arrêté « que le règlement communal ne souffre d’aucun problème de légalité et est conforme à l’intérêt général… » et s’appuie dans son entièreté sur l’avis de la Section Nature.

 

Pour NTF, ne pas créer un précédent dangereux

NTF, membre de la Section Nature, avait manifesté en séance toutes ses réserves sur la manière d’utiliser cette loi pour régler des problèmes qui en principe sont gérés par d’autres décrets. Le risque étant que les communes usent de cette possibilité de sévérité sur leur territoire jugeant les décrets wallons trop laxistes pour protéger la nature ! Pour reprendre notre exemple, une commune déciderait de mettre 10 m de distance par rapport aux cours d’eau, une autre encore 20 m etc. Plus alarmant, la LCN pourrait devenir supérieure à toutes les autres lois, son article 58 quinquies permettant aux communes d’adopter des lois locales qui détricoteraient au fur et à mesure et de manière peu visible, les règles de protection de l’environnement consacrées dans le paysage législatif wallon depuis plus de 20 ans, en concertation avec les représentants des secteurs agricoles et forestiers. Imaginez la multiplication de législations différentes sur des territoires limités, établies en fonction de la couleur politique du moment et de ses préoccupations. C’est tout notre système qui s’étiolerait au gré et entre les mains de 262 pouvoirs locaux, eux-mêmes victimes ou auteurs de pressions pour une écologie toujours plus répressive.

 

C’est pour cette raison que ce dossier est déterminant pour le maintien de notre démocratie ; cela va bien au-delà du (simple) respect des droits de la propriété privée, pour lesquels NTF doit continuellement justifier sa raison d’être sans honte. Il nous semble évident que l’utilisation qui est faite de l’article 58 quinquies de la LCN dans le présent dossier doit être soumise au Conseil d’Etat. C’est la décision que NTF a prise.



[1] « Les conseils communaux peuvent prendre pour tout ou partie du territoire communal des règlements ou ordonnances plus stricts que les dispositions supérieures relatives à la protection des espèces végétales ou animales non-gibiers. »